Enfants durant la deuxième Guerre, ils témoignent

Deux grands témoins de l'histoire ont rencontré des collégiens

Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, quelques langues se délient. Certains survivants veulent témoigner, raconter l'indicible, la nourriture qui manque, la cohabitation allemande, se souvenir des morts et disparus, des rafles, les soldats veulent dépeindre l'horreur qu'aura été le front... Seulement, beaucoup ne sont pas prêts à entendre, cette réalité charrie trop de souffrances. On ne les a pas crus, alors ils se sont tus.

Il faudra attendre la fin des années 60 pour que des déportés posent par écrit l'atrocité des camps, et le milieu des années 80 que les grands témoins de cette époque fassent leur entrée dans les écoles. Aujourd'hui, de ces passeurs de mémoire, ne reste qu'une poignée. Les plus jeunes ont fêté leurs 90 ans. Mais ces derniers se sont fait un devoir de transmettre, pour ne pas oublier, pour que l'histoire ne se répète pas.

Enfants de la guerre

Hier, à l'espace Saint-Exupéry, ils n'étaient que deux sur les cinq intervenants prévus, à raconter leur histoire. Leurs trois camarades n'ont pu être présents, la santé déclinant.

Face à Pierre Draï et Françoise Nègre, les 3e du collège Jacques Prévert, de Saint-Victoret. "Nous avions convié tous les collèges et lycées de Marignane, c'est incompréhensible de voir si peu d'établissements assister à ce rendez-vous", s'est ému Jean-Pierre Beaux, le président du comité départemental du concours national de la Résistance et de la déportation, à l'origine de ces rencontres. Le thème du concours - ouvert à tous les élèves de 3e et lycéens -, cette année, est "1940, entrer en Résistance. Comprendre, refuser, résister". Comprendre, c'est le cheminement qu'a entrepris Pierre Draï en 2008. Cette année-là, il part sur les traces de son enfance et de la tragédie vécue par sa famille, ne disposant que d'indices fournis par son frère, âgé de 8 ans en 1943. "On m'a dit que si j'étais un orphelin de la guerre et que j'avais survécu, c'est parce que j'étais un enfant caché", a-t-il confié, les larmes serrant encore la gorge de cet homme qui doit beaucoup "au hasard".

Comme on enquête, Pierre Draï entreprend de faire la lumière sur son passé, il retrouve la fille des pasteurs Funé, ces Justes qui lui ont sauvé la vie. "En faisant la lumière sur ces éléments, je suis tombé en dépression. De pouvoir rendre hommage - dans son livre La mémoire déverrouillée Ndlr - à ces gens m'a sauvé."

Ses parents, d'origine Algérienne, ont quitté le pays pour suivre leur employeur à Paris. Y nait une fille, Nelly. Elle est la dernière de six enfants. Pierre Draï, lui, souffre de la tuberculose depuis ses neuf mois, il est soigné à l'hôpital. En 1943, l'enfant a 3 ans. Sa mère est arrêtée par les Allemands et déportée avec ses trois fils aînés (convoi n° 59 du 2 septembre 1943), tandis que son père, qui a réussi à fuir, est dénoncé, arrêté et déporté (convoi n° 67 du 3 février 1944). Les pasteurs, qui avaient aidé la famille jusqu'alors, apprennent qu'une soixantaine d'enfants hospitalisés ont été raflés, le couple vient chercher Pierre Draï, afin de lui éviter telle fin. Le petit malade restera dans un sanatorium jusqu'à la fin de la guerre. Son oncle, devenu son tuteur, le place en orphelinat. "J'ai retrouvé mon frère et ma sœur à 20 ans, je ne connaissais rien de la vie." L'homme raconte son parcours, son adaptation au monde. Puis, Françoise Nègre prend le relais. Celle qui avait deux ans à l'époque évoque sa grand-mère, sa mère, sa tante, son institutrice... Toutes veuves de guerre, habillées de noir. "L'ambiance était lourde, pesante, les adultes ne parlaient pas." Vient ensuite "la disparition de Maurice, 7 ans, et de toute sa famille - ils ont tous été gazés -, la peur des Allemands, grands, dans leurs bottes en cuir, peur à laquelle succède celle des bombardements anglais, qui détruiront la ville." Sa famille réussira à quitter Caen, ville devenue piège parce qu'encerclée par la rivière, les ponts étant détruits.

L'ancienne institutrice pose alors la question du choix. "Comprendre, c'est prendre position, acter une décision. On peut faire l'autruche, beaucoup se sont dits "après tout" durant cette période et n'ont rien fait, on peut aussi rallier le côté du dominant, c'est ce qu'ont fait les collaborateurs, et puis il y a ceux qui ont refusé, se sont engagés, le payant de nombreuses vies, dans la Résistance. Résister nécessite plusieurs éléments : il faut avoir conscience de lutter, dépasser les gestes isolés et spontanés pour s'inscrire dans une structure." L'intervention terminée, nombre d'élèves, émus, ont remercié leur interlocuteur. Le message semble être passé.

Chanaël CHEMIN

Chanaël Chemin la Provence - vendredi 29 novembre 2019
Chanaël Chemin la Provence - vendredi 29 novembre 2019
Chanaël Chemin la Provence - vendredi 29 novembre 2019

E-mail

  • Groupe Marignane Info

    Groupe Marignane Info

    Le site internet de la ville de Marignane qui vous donne la parole et l'image.

    • Prix de l'information par internet
    • Trophée des associations de commerçants
    • En ligne depuis 2002
  • Service & Gratuité

    Service & Gratuité

    Icon TrainerListing des commerces

    Icon Fitness LevelsReportages pour les associations

    Icon SmoothieLa mémoire de Marignane archivée

  • Rêvons notre ville et construisons la!

    Rêvons notre ville et construisons la!

    Marignane est devenue au fil des années une ville sans âme, privée de vie, privée d’animations, sale, désertée. Elle a connu ses heures de gloire, elle fut pendant longtemps une ville admirée, enviée par ses voisins. Mais peu à peu, l’usure d’un pouvoir trop longtemps en place, l’incompétence, et puis cette fatidique année 2008 ont eu raison d’elle.

UA-69538031-1

recherche Marignane