Henry Blanc, la fin d’une époque
DISPARITION Le charismatique patron des cafés éponymes est décédé hier. Évocation...
La réussite d’un homme, comme je l’ai toujours dit à mon fils Jean-Luc, c’est de se déposséder du péché d’orgueil." Ainsi parlait Henry Blanc lorsqu’on lui demandait s’il était fier de son parcours à la tête d’une des plus belles entreprises locales spécialisée dans la torréfaction. Hier, en début d’après-midi, le père des cafés éponymes s’est éteint à l’âge de 81 ans, emporté par une longue et cruelle maladie. Avec sa disparition, c’est toute une page de l’histoire de l’économie marseillaise et régionale qui se tourne.
C’est qu’Henry Blanc a accompagné des générations de Phocéens, au comptoir ou à la maison, à l’heure du petit noir. Celui qui avait créé une véritable dynamique autour du "café des cafés", puis en rachetant les boutiques Noailles, était un patron à l’ancienne. Et familial. Au siège de la société, à la Capelette, il connaissait le prénom de chacun de ses 130 salariés, tous très "corporate", selon l’expression d’aujourd’hui. Ce qui fait dire à son fils Jean-Luc, vice-président de la Chambre de Commerce, qui perpétue la saga familiale, avec l’épouse d’Henry, Michèle : "Nous tenons à notre identité forte. Le plaisir ce n’est pas que l’argent. Cette entreprise est familiale et, toutes proportions gardées, c’est comme chez Ricard ; c’est générationnel, on veut transmettre aux enfants. Mon grand-père a agi ainsi avec mon père Henry, ce dernier m’a mis le pied à l’étrier et j’espère que mes enfants, les jumeaux, perpétueront plus tard ces cafés Henry Blanc".
Gaudin salue "un pilier de l’économie locale"
Henry Blanc, en effet, pouvait être fier de son parcours, lui qui, à 17 ans, et sans aucun diplôme, vient aider son père à la tête d’une petite torréfaction, "A la Bonne Maman", située dans le centre-ville. Depuis ce jour-là, Henry ne quittera plus jamais le monde du café au point de laisser, 60 ans plus tard, à l’heure d’une retraite plus que méritée, une entreprise pesant 16 millions d’euros de chiffre d’affaires, 800 tonnes de café importées du monde entier torréfiées chaque année pour un groupe sain (Henry Blanc, Noailles et Provence Café qui diffuse notamment capsules et dosettes). De nombreux hommages sont venus saluer la mémoire de ce Marseillais. Jean-Claude Gaudin sénateur-maire, estime que "Marseille perd aujourd’hui l’un des piliers de l’économie locale, le témoin-acteur d’une époque toute entière". De son côté, Martine Vassal, présidente du Conseil départemental, note "qu’Henry Blanc était et restera un fils de Marseille et du département. Un homme généreux pour qui le mot amitié n’était pas un vain mot, il aimait partager son goût de la vie et son bonheur." Quant à Jacques Pfister, président de la Chambre de Commerce et d’Industrie, il salue "une figure emblématique de l’industrie locale. Henry Blanc c’est Marseille commerçante, entreprenante, innovante et attachante." Pour Guy Teissier, président de MPM, "il restera un modèle de chef d’entreprise novateur ayant œuvré pour la renommée et le développement économique de notre territoire."
Henry Blanc, le capitaine d’industrie, c’était aussi un épicurien, amateur de bonne chère, qui a toujours brûlé la vie, avec envie, par les deux bouts. Un fou de pétanque et de jeu provençal, un amoureux inconditionnel de l’OM où il fut cadet avant de devenir, dans les années 70, vice-président du club puis membre du comité directeur à la fin des années 90. Cet ami, notamment de Salif Keïta ou Josip Skoblar, ne manquait jamais un match de son OM chéri ! Institution où il a connu une charmante secrétaire, Michèle, devenue son épouse… Aujourd’hui, au paradis des bons vivants, Henry, peut être rassuré : Michèle et son fils Jean-Luc, à qui La Provence présente ses très amicales condoléances, gardent le cap d’un capitaine éclairé.
Au café, Henry Blanc est immortel!
Éric ESPANET